Le parc Horch de Beyrouth : zone interdite puis libérée

Publié le 8 mars 2016

En 2016, de nombreux articles de presse mentionnaient que le poumon vert de Beyrouth était une zone fermée, interdite au public. Ce n’est heuresement plus le cas en 2021. Les globe-reporters questionnent Léon TELVIZIAN, un universitaire réputé qui habite à quelques pas du parc.

Environnement et transition énergétique

Léon TELVIZIAN est architecte et urbaniste. Il répond aux questions de Vincent, Tom, Emy, Zoé et Morgan.

Y a-t-il de nombreux espaces verts à Beyrouth ?

Depuis la fin de la guerre, la capitale libanaise est prise d’une véritable frénésie immobilière, qui n’en finit plus de ronger les espaces verts.

En tout, Beyrouth compte 47 espaces verts et places aménagés. Mais parmi ceux-ci, de nombreuses étendues sont privées, et donc fermées au public. En ce qui concerne les espaces verts publics, certains ne sont pas nécessairement totalement ouverts au public. À l’instar du plus grand parc de la ville, le Bois des Pins, accessible seulement à certains riverains et durant les fins de semaine.

Au final, les espaces verts réellement accessibles au public sont rares. Souvent petits, non aménagés pour les enfants, et rarement isolés de la pollution sonore et automobile. En termes de chiffres, on compte 0.6m2 d’espaces verts à Beyrouth contre 10m2 recommandés par l’Organisation mondiale de la Santé (source l’Orient le Jour).

Si non, quelles en sont les raisons ?

Essentiellement, le retrait des autorités publiques en matière d’aménagement urbain qui se traduit par le manque de législation et de planification pour un développement socio-économique équilibré et équitable. Le territoire est ainsi laissé aux soins de promoteurs immobiliers qui se l’approprient par les règles du marché.

Pourquoi les Libanais portent-ils un tel attachement au cèdre ?

Le cèdre qu’on retrouve au Liban (Cedrus Libani) est originaire du pays. C’est un emblème national, que l’on retrouve notamment sur notre drapeau. Il est le symbole du Liban. Il est considéré comme un arbre sacré, car il est mentionné dans les trois grandes religions monothéistes et fut chanté par de célèbres écrivains : Gibran Khalil Gibran, Antoine de Saint-Exupéry, Alphonse de Lamartine.

Pour les Libanais, le cèdre est un symbole d’espoir, de liberté et de mémoire.

 

Une vue partielle du parc de Horch Beyrouth, le 21 mai 2015 au Liban. Copie d’écran du site de l’Express

Le parc de Horch de Beyrouth est fermé au public, mais est ouvert aux Occidentaux. Quelle est la raison d’une telle mesure ?

Il est non seulement ouvert aux occidentaux, mais aussi pour la population de moins de 18 ans et plus de 45 ans. Mais récemment il est ouvert les weekends aussi. La raison invoquée par la municipalité, la peur de vandalisme, car elle n’a pas les ressources financières pour le contrôle des visiteurs. Mais la vraie raison réside peut-être dans son emplacement stratégique qui se trouve à l’interface de quartiers à dominantes palestinienne, chiite et chrétienne. D’où la peur (non fondée) par les autorités municipales de son appropriation par une composante sociétale.

Juridiquement, est-il possible d’interdire l’accès au parc aux habitants ?

Aucune interdiction juridique. L’accès est régulé par une décision de la municipalité. D’où la pression des ONG pour son ouverture au grand public afin que ce parc devienne un espace public pour tous.

Des mesures ont-elles été prises pour responsabiliser les gens au développement durable ?

Le développement durable est un paradigme qui commence à faire son chemin dans le vocabulaire et le discours aussi bien de la population que des élus et décideurs. Cependant, il reste un terme générique et n’est pas pour l’instant traduit en termes d’actions et de politiques. Toutefois, les campagnes de sensibilisation se développent à grande vitesse surtout dans les écoles et les universités. 

Quels ont été les évènements passés qui ont poussé à prendre cette décision ?

Le peu d’espaces verts disponibles dans les villes. Mais surtout la mauvaise gestion des ressources naturelles comme l’eau (sa pénurie dans un pays qui en principe est en soi un grand réservoir d’eau).

Il est question déplacer le stade de la ville de Tareik Jdideh dans le parc d’Horch ? Cela détruirai le dernier espace vert, n’y aurait-il pas une contradiction ?

Une partie clôturée sert déjà de terrains de tennis et basketball pour les habitants de Beyrouth. Mais le reste non. Le parc de Horch restera le poumon vert (le seul) à Beyrouth. Un point sur lequel tous les beyrouthins sont d’accord malgré leurs différences.

Un entretien réalisé en janvier 2016 et actualisé en janvier 2021

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