Graffiti ≠ vandalisme. La preuve, le festival Djerbahood

Publié le 17 janvier 2015

Mehdi Ben Cheikh est franco-tunisien. C’est lui qui a organisé l’événement « Djerbahood ». Il répond aux globe-reporters de la 6ème géranium du collège Jean Lafosse de Saint Louis.

Culture et francophonie

Comment avez-vous fait pour préparer le festival Djerbahood ?

La chose la plus dure était d’avoir les autorisations administratives. On a demandé directement au 1er ministère, grâce à l’ambassadeur de Tunisie en France. Puis il a fallu trouver les sous pour transporter et loger les artistes, qui ont travaillé gratuitement. Je les connais depuis longtemps, je suis galeriste depuis dix ans et beaucoup avaient déjà participé au projet de la Tour Paris 13.

Pourquoi avez-vous fait les graffitis sur les murs de Djerba ? Qu’est-ce qui vous a donné l’idée de faire le festival ? Pourquoi avoir choisi Djerba ?

Ce n’est pas un festival, c’est une tentative de créer un musée à ciel ouvert. Je suis galeriste de ce mouvement artistique, je dois donc trouver des moyens de le soutenir, de créer des temps forts pour marquer les esprits.
Je voulais faire quelque chose en Tunisie depuis très longtemps. J’y ai vécu pendant 20 ans. Pourquoi Djerba ? Il y avait un village authentique, proche d’un aéroport, ce qui est pratique, car les artistes viennent du monde entier (une trentaine de pays différents).

Est-ce que cela a dérangé de faire un festival de graffiti ?

Moins qu’ailleurs, contrairement à ce qu’on pourrait croire. J’avais organisé quelque chose dans le village de ma grand-mère, en Seine-et-Marne. On a dû s’arrêter au bout de 30 fresques, car ça dérangeait trop de monde. Alors qu’à Djerba, on a atteint 250 à 300 fresques. Ça en dit long.
Bien sûr, il y a toujours des réticences, mais il faut bousculer les mentalités pour les faire avancer. Au début, les gens avaient des craintes, parce qu’ils ne savaient pas ce que c’était. Ils pensaient graffiti = vandalisme, que leur village allait être sali. En fait, ça lui a donné une valeur ajoutée.

Découvrez Djerbahood sur Arte en cliquant sur l’image

Y a-t-il un thème au festival de graffitis ?

Non, la seule contrainte pour les artistes, c’était de tenir compte de l’endroit. C’est la base du street art. Il peut s’agir, par exemple, de détourner la fonction d’un endroit, ou de faire resurgir une histoire qui s’est passée à cet endroit, ou encore de travailler à partir de son architecture (jouer avec une fenêtre, une poutre, une couleur...)

Connaissez-vous un graffeur réunionnais, Jace qui fait notamment beaucoup de grands graffitis ?

Oui, puisque je l’ai invité ! J’aime beaucoup son univers des gouzous. Je vais vous donner son email.

Est-ce qu’il est prévu de faire d’autres éditions de ce festival ?

La suite dépendra des gens et des associations de Djerba. Ce n’est pas à moi de tout faire. Je veux que l’effort vienne d’eux cette fois.

Les graffitis ont-ils été vandalisés depuis cet été ? Se sont-ils abimés puisqu’ils sont en plein air ?

On a mis une couche de vernis par-dessus, pour les protéger, Les fresques commencent à se détériorer, mais pas tellement. Quelques-unes ont été un peu abîmées par les gens. Un ou deux trucs ont été volés, des bouts qui étaient sur des choses qui peuvent s’enlever et s’emporter. C’est la même chose à Paris. Certains n’ont pas compris que c’était un art partagé, ils veulent se l’approprier.

Les graffeurs sont-ils reconnus comme de vrais artistes ?

Ils sont de plus en plus reconnus comme de vrais artistes. Au début, comme à chaque fois quand un mouvement artistique dérange, on commence par le refuser, parce qu’il apporte trop de changement. Mais petit à petit, le street art s’impose.

Y-a-t-il des graffeurs renommés en Tunisie ?

Oui, on peut citer El Seed, qui a une renommée internationale, ou d’autres, moins connus, comme Shoof ou Da Bro.

Sur le site de El Seed

Combien y avait-il de graffeurs tunisiens au festival de grafs en été 2014 ?

Sur un peu plus de 100 artistes, environ 15% étaient des tunisiens.

Certains graffeurs font-ils des plagiats ?

En tout cas, ce n’est pas très bon de copier, car on ne crée rien. Celui qui est copié, en revanche, pourra toujours créer d’autres choses.

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Découvrez les réponses de l’artiste tunisien Tahar MGUEDMINI qui a participé à Djerbahood aux questions des globe-reporters.

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