Metaleurop, et après ?

Publié le 28 avril 2019

Guillaume LEMOINE est référent biodiversité et ingénierie écologique au sein de l’Etablissement Public Foncier (EPF), le recycleur du foncier dans le Pas-de-Calais. Il répond par écrit aux questions des collègiens de Leforest sur la pollution autour de Metaleurop.

L’Anthropocène : état des lieux

Guillaume LEMOINE est référent biodiversité et ingénierie écologique au sein de l’Etablissement Public Foncier (EPF)

Metaleurop était une des usines les plus polluantes de France, comment se manifestait la pollution ?

Il s’agissait d’une usine métallurgique qui produisait du plomb. La pollution se caractérisait principalement par des particules de plomb, zinc et cadmium qui retombaient en fumées.

Pourquoi la pollution n’est pas partie au fil des années ?

Les atomes ne se dégradent pas. Le plomb reste du plomb... les métaux lourds restent donc. Seules les pollutions organiques (molécules complexes faites à bases d’atomes (oxygène, carbone , hydrogène.) peuvent être « cassées » pour devenir des atomes ou des molécules plus simples (H2O, CO2…)

Qu’est-ce qui pollue les sols ?

Les métaux lourds à fortes concentrations sont toxiques pour la flore et la faune. La pollution n’est donc dangereuse que si elles est « assimilée » par le vivant.

Pourquoi est-ce dangereux pour la santé ?

A forte concentration, les métaux lourds perturbent le fonctionnement des organismes vivants (baisse d’activité, réduction de croissance, perturbations du système nerveux). Le saturnisme est une intoxication au plomb.

Est-ce que c’est risqué de manger des légumes cultivés à Evin ou Leforest ?

Oui et non, certains légumes n’accumulent pas de métaux lourds, certains légumes, s’ils sont lavés sont débarrassés des poussières riches en ETM (éléments traces métalliques). Certains terrains sont « sains » c’est à dire dépollués.. donc le risque varie très fort en fonction des situations et des cultures, des taux de pollution et de la capacité qu’ont ou n’ont pas les ETM à être « mobilisés » par les plantes, donc être assimilés.

Donc on peut avoir un sol riche en métaux lourds, et avoir des conditions de sols (pH très alcalin...) qui bloquent les métaux au niveau de complexes argilo-humiques qui empêchent tous transferts.. donc chaque situation est un cas particuliers. 

Evin-Malmaison est-elle la seule ville touchée par la pollution de Metaleurop ? Qu’en est-il de Leforest ? et des villes avoisinantes ?

On peut facilement imaginer que les fumées ont déposé les métaux en fonction de la direction des vents.

Les vents dominants chez nous sont d’Ouest, donc c’est à l’Est de l’usine que les dépôts seront les plus importants.. et plus on s’éloigne.. plus les fumées sont dispersées donc la pollution réduite.

Qu’est-ce qui a été fait / est fait pour dépolluer les sols ?

Différentes actions ont été menées par l’entreprise : acquisition de terrains et plantations de forêts pour éviter la culture sur les espaces où les concentrations en ETM sont les plus élevées.

Différentes méthodes de phytomanagement sont testées depuis 20-30 ans. Par exemple, on a testé et on teste des phytoextracteurs : utilisation des plantes hyperaccumulatrices pour extraire les métaux

On teste des traitement de sol pour empêcher la mobilisation des ETM (chaulage des terrains, utilisation de biochar (charbon de bois)). On teste des plantes qui vont accumuler les ETM dans leur racines pour non dans les parties aériennes utilisées.

Qu’en pensez-vous ? Est-ce suffisant ?

C’est très complexe. L’extraction des ETM est quasi impossible sur un laps de temps court. C’est donc la gestion du risque qui est privilégiée. C’est à dire s’arranger pour que les ETM ne bougent pas.

Lorsqu’on les extrait (production de biomasse (bois, miscanthus) il faut savoir les récupérer dans les cendres des chaudières pour éviter de les disperser et pour les neutraliser, les concentrer et les stocker dans un espace approprié.

Est-ce que les habitants sont suffisamment informés des risques et de l’état des sols sur lesquels ils habitent ?

Oui, il y a nombreuses informations diffusées depuis de nombreuses années.

Il y a aussi un PIG (plan d’intérêt général) qui conditionne l’usage des terres (agriculture, urbanisme…)

L’usine Nyrstar est toujours en activité à Auby, est-ce qu’elle pollue autant les sols que Metaleurop ?

Aucune idée

Qu’est-ce qui est mis en place pour limiter les conséquences ?

Les usines en place sont les héritières d’actions anciennes. La compagnie saturnienne des mines a du s’implanter vers 1860 -1880. Les pollutions anciennes sont traitées (décapage et confinement des sols), les process modernes limitent l’émission des polluants (filtres à fumées). Le PIG doit également s’appliquer.

Les cultures sont surveillées et contrôlées. 

La reconversion du territoire avec Delta 3 : quelles conséquences sur l’environnement de tous ces passages de camions ?

Aucune idée.

Pouvons-nous boire l’eau du robinet sans risque ?

Il n’y a pas de transfert des ETM vers l’aquifère profond (nappe de la craie), ils restent en surface. Les nappes souterraines par contre peuvent être impactées par les pollutions agricoles (attrazine, pesticides divers, azote…) mais c’est ici du cas général pour toute la France.

Les entreprises fournisseuses d’eau font des analyses et les communiquent aux consommateurs.

Pourquoi l’eau de Leforest et Evin-Malmaison vient de Flers-en-Escrebieux (captage géré par la Société des Eaux du Nord) ?

Car c’est là qu’est l’accès à l’aquifère, et c’est là qu’est le pompage.

Comment sont recyclées les eaux usées et que deviennent-elles ?

Elles sont recyclées en station d’épuration (sur oxygénation de l’eau pour dégrader les molécules organiques (processus vivant), décanter les matières plus solides/lourdes. Après la dépollution, les eaux repartent dans les milieux naturels (rivières)

Interview réalisée en mars 2019

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