« Il est difficile de trouver des informations quand les autorités s’y opposent »

Publié le 8 avril 2022

Elif, Alvin, Can, Özge, Deniz, Melis et Ayşe, élèves au Lycée Saint-Benoît d’Istanbul enquêtent sur la corruption au sein du système de santé et sur le rôle des médias après l’incendie du club Colectiv en 2015. Mihaela RODINA, journaliste au bureau de Bucarest de l’Agence France-Presse, répond à leurs questions.

Droits humains, solidarités et citoyenneté

Les globe-reporters d’Istanbul réalisent un reportage sur un sujet connu mais aussi sensible en Roumanie : la corruption dans le système de santé. Même s’il était souvent abordé dans la presse roumaine, ce sujet refait la Une des journaux après l’incendie d’une discothèque, le club Colectiv le 30 octobre 2015, qui a fait 64 morts. Parmi ces décès, près d’une trentaine ont eu lieu plus tard dans les hôpitaux, notamment à cause de bactéries nosocomiales, c’est à dire des bactéries attrapées dans des établissements de santé. Ce chiffre élevé alarme des journalistes, qui enquêtent et révèlent un scandale sanitaire sans précédent. Le documentaire « L’Affaire Collective », qui a été nominé aux Oscars en 2021, suit les journalistes dans leurs investigations.

Pour répondre aux questions des globe-reporters, Marine LEDUC essaie de trouver une personne francophone qui travaille dans la santé. Et ce n’est pas ce qui manque : entre les docteurs qui parlent français et les professeurs dans les sections francophones des universités de médecine, il doit sûrement bien y avoir une personne qui voudra répondre. Sauf que cela se révèle bien plus compliqué que prévu. Marine passe par toutes les voies possibles : amis docteurs, Université de médecine de Bucarest, médecins francophones inscrits sur la liste de l’ambassade française, groupes Facebook… Soit elle ne reçoit pas de réponse, soit on ne la recontacte plus après un premier appel, ou même, on rejette sa requête. « Je ne peux pas répondre à ces questions » dit l’un, « C’est un sujet sensible » répond un autre. « Il y a autant de corruption en France ! » rétorque un dentiste. 

Mais un journaliste a toujours plus d’une corde à son arc, et les questions peuvent aussi être adaptée pour un.e journaliste francophone. Les globe-reporters turcs avaient d’ailleurs émis cette idée en cas de difficulté à trouver un médecin. Marine pense tout de suite à Mihaela RODINA, journaliste et cheffe du bureau de l’AFP à Bucarest. L’AFP est « L’Agence France-Presse », une des plus grosses agences de presse au monde à côté de Reuters et Associated Press (AP). Ils sont implantés partout en France et dans quasiment tous les pays du monde. Lorsqu’un média est abonné à une agence de presse, il peut republier l’article sur son site. Même s’il y a parfois eu quelques erreurs, reconnues par la suite, l’AFP reste une source sûre avec des journalistes rigoureux. Toutefois, les rédactions financent de moins en moins la présence de correspondants et préfèrent republier des papiers de l’AFP. Cela peut donc empêcher d’avoir une diversité de sujets internationaux dans les médias.

Marine contacte alors Mihaela par mail. Celle-ci lui répond aussitôt qu’elle serait ravie de faire l’interview, mais qu’elle doit d’abord demander l’accord du bureau de Vienne, dont dépend le bureau de Bucarest. L’accord obtenu, Marine et Mihaela conviennent d’une date : le 24 février. Mais le matin de la rencontre, l’Ukraine est attaquée par la Russie. Elles discutent, se disent qu’elle vont peut-être avoir le temps de la faire, mais finalement non : l’actualité chaude sur le terrain est la priorité. Il faudra donc repousser l’entretien. Après plusieurs semaines intenses pour les journalistes, elle finissent par retrouver un moment pour réaliser l’interview. Marine se rend au bureau de l’AFP en bus. Une vingtaine de minutes plus tard, elle descend à « Piata Dorobantilor », dans un quartier huppé de la capitale. Elle marche ensuite quelques minutes pour retrouver le bureau de l’AFP, situé au rez-de-chaussée d’un immeuble de quelques étages. 

Un entretien réalisé en avril 2022

Sources photographiques

Piata Dorobantilor à Bucarest, où Marine descend du bus. © Globe Reporters
Piata Dorobantilor à Bucarest, où Marine descend du bus. © Globe Reporters
Les rues du quartier portent des noms de capitales. Ici, la “rue d’Ankara”, capitale de nos globe-reporters turcs. © Globe Reporters
Les rues du quartier portent des noms de capitales. Ici, la “rue d’Ankara”, capitale de nos globe-reporters turcs. © Globe Reporters
La “rue du Musée Zambaccian”, où est situé le bureau de l’AFP. © Globe Reporters
La “rue du Musée Zambaccian”, où est situé le bureau de l’AFP. © Globe Reporters
La plaque de la“rue du Musée Zambaccian”, sur le modèle de celles de Paris. © Globe Reporters
La plaque de la“rue du Musée Zambaccian”, sur le modèle de celles de Paris. © Globe Reporters
Entrée du bureau de l’AFP. © Globe Reporters
Entrée du bureau de l’AFP. © Globe Reporters
Mihaela RODINA à son bureau. © Globe Reporters
Mihaela RODINA à son bureau. © Globe Reporters
Mihaela RODINA et son collègue Ionut. © Globe Reporters
Mihaela RODINA et son collègue Ionut. © Globe Reporters
La télévision est toujours allumée dans le bureau de l’AFP pour faire une « veille » de l’actualité. © Globe Reporters
La télévision est toujours allumée dans le bureau de l’AFP pour faire une « veille » de l’actualité. © Globe Reporters
Affiche de la déclaration qui annonce la fondation de l’AFP, à la Libération pendant la Seconde Guerre Mondiale. © Globe Reporters
Affiche de la déclaration qui annonce la fondation de l’AFP, à la Libération pendant la Seconde Guerre Mondiale. © Globe Reporters
Mihaela RODINA à son bureau. © Globe Reporters
Mihaela RODINA à son bureau. © Globe Reporters
Piata Dorobantilor à Bucarest, où Marine descend du bus. © Globe Reporters
Les rues du quartier portent des noms de capitales. Ici, la “rue d’Ankara”, capitale de nos globe-reporters turcs. © Globe Reporters
La “rue du Musée Zambaccian”, où est situé le bureau de l’AFP. © Globe Reporters
La plaque de la“rue du Musée Zambaccian”, sur le modèle de celles de Paris. © Globe Reporters
Entrée du bureau de l’AFP. © Globe Reporters
Mihaela RODINA à son bureau. © Globe Reporters
Mihaela RODINA et son collègue Ionut. © Globe Reporters
La télévision est toujours allumée dans le bureau de l’AFP pour faire une « veille » de l’actualité. © Globe Reporters
Affiche de la déclaration qui annonce la fondation de l’AFP, à la Libération pendant la Seconde Guerre Mondiale. © Globe Reporters
Mihaela RODINA à son bureau. © Globe Reporters

Sources sonores

  • Pouvez-vous vous présenter ?

  • Dans quelle mesure le public roumain est il conscient de la corruption du système de santé ?

  • Avez-vous déjà été affectée par la corruption de ce système ?

  • Comment la tragédie Colectiv persiste-t-elle dans la mémoire des Roumains ?

  • Est ce que le système de santé s’est amélioré depuis ?

  • Y a-t-il eu des condamnations suite à l’affaire Colectiv ?

  • Et pour les responsabilités médicales, y a-t-il eu des condamnations ?

  • Le public a t il été bien informé ? Les journalistes indépendants ont-ils fait leur travail ?

  • Quelque chose a-t-il changé dans les médias ? Le public comprend il l’importance des médias indépendants, de l’enquête ?

  • La Roumanie est le pays européen où les dépenses de santé sont les moins importantes, les augmenter seraient elles une solution pour combattre la corruption ?

  • Le documentaire sur l’affaire Colectiv a été sélectionné aux Oscars, est-ce que cette attention a eu un effet positif en Roumanie ?

  • Avez-vous un message pour les globe-reporters EMICE + ?

  • Question bonus : quelles qualités doit avoir un journaliste selon vous ?