"En Tunisie, c’est interdit que des enfants travaillent avant 15 ans", Hamideddine Bouali, photographe.
Publié le 23 janvier 2013
Hamideddine Bouali organise des ateliers pour faire découvrir aux enfants la photographie. Une manière d’aider certains enfants en difficulté. Une interview des globe-reporters du collège Camille Claudel, à Paris.
Quelle est l’approche pédagogique adoptée avec les enfants ?
Je leur dis que personne n’a ni tort ni raison. Chacun est libre de penser et d’interpréter les choses comme il veut, selon ses propres perceptions. Les enfants étaient contents de cette approche. Ils n’avaient pas honte de se tromper et n’hésitaient pas à participer. Dans la classe, il y avait un écolier qui bégayait, on m’avait prévenu que d’habitude il ne parle jamais. Dans mon atelier, il s’est complètement libéré !
Comment étaient les enfants à la fin des cours ?
L’atelier leur a donné envie de vivre encore plus d’expériences comme celle-là. Ils se sont habitués à une nouvelle méthode pédagogique qui leur convenait. A la fin de l’atelier, un des enfants est venu me voir en pleurant et m’a demandé si c’était vrai que je ne viendrai plus dès le lendemain. Cela m’a fendu le cœur.
Il faut savoir qu’à Kallal Sammama, il n’y a rien d’autre qu’un dispensaire, une mosquée et une école. Cette dernière est le seul endroit où les enfants peuvent se rencontrer, rester ensemble et entendre autre chose que ce qu’ils entendent à la maison. Leur seule distraction c’est donc l’école. Les ruines de Sbeïtla, le site archéologique le mieux préservé de la Tunisie, n’est qu’à 15 km de leur village. Pourtant, les enfants n’y ont jamais mis les pieds.
De plus, ils vivent dans un isolement total. Quand je leur ai montré une de mes vidéos, qui résume en images l’année 2012, ils m’ont demandé après ce qu’était la Saint Valentin, ce que faisait le drapeau de l’Arabie Saoudite en Tunisie en voyant le drapeau noir porté par les salafistes, pourquoi les gens dormaient dans la rue... Ils sont hors du coup ! J’en ai profité pour ouvrir une parenthèse et expliquer que dans les grandes villes il n’y a pas que des avantages mais aussi des inconvénients, comme l’indifférence et la pollution.